"Crossing" traversée de cours d'eau
Le crossing n'est qu'un court moment de la migration, quelques heures sur 8-9 mois de transhumance, mais ce sont des heures cruciales toujours, fatales parfois.
Nos amis gnous (zèbres, gazelles) sont attendus. Avec combien d'impatience, ô combien ! La traversée de la Mgabaleti, de la Grumeti au nord-ouest (Western Corridor, corridor ouest), la traversée de la Mara au nord-est sont des aubaines pour les crocodiles, ce n'est pas pour rien que ceux de la Grumeti comptent parmi les plus gros d'Afrique.
On hésite au bord, on recule, on se trempe, on ressort. Et finalement on y va, à plusieurs.
gnous et zèbres dans la Mara
Migration : gnous traversant la Mara
Et alors, c'est Byzance pour les crocos, quelles agapes chaque année, de quoi tenir jusqu'au prochain été ! Encore une fois, c'est le nombre qui sauve ! Les gnous dans la rivière sont si nombreux que l'on ne sait plus où donner du croc ! C'est à pleurer, toute cette nourriture gâchée qui va prendre pied de l'autre côté. C'est encore plus à pleurer, larmes de crocodile bien sûr, quand dérivent au gré du courant des dizaines, des centaines de gnous noyés, étouffés qui ne profiteront à personne, tant les ventres sont déjà pleins... Cette traversée des cours d'eau ou crossing qui n'est pas sans risque est pourtant parfois faite dans un sens puis dans l'autre la même journée, sans raison apparente, sinon le besoin grégaire de suivre le troupeau : dès qu'un "leader" s'est jeté à l'eau pour traverser, il est assuré, ou presque, d'être suivi du reste du troupeau...
Ciel, on me suit !
Migration : crocodile et gnou, la rencontre fatale
Migration : un crocodile a attrapé un gnou, drame à succès qui se joue et rejoue depuis des milliers d'année !
le drame est parfois plus feutré, comme ci-dessus où l'un des gnous discrètement happé
a le museau en l'air, un autre a seulement une corne encore émergée
Le gnou est-il stupide ?
Du moins aussi stupide que dans cette célèbre "gnou vidéo" du Birdbox Studio?
Au niveau de l'individu, le comportement paraît suicidaire, passer et repasser dans le même endroit de la rivière manifestement peu ou pas praticable, servir de pâture aux crocodiles, faut pas être très malin, et effectivement notre ami gnou ne semble pas respirer l'intelligence. Mais selon un vieil adage à moi que j'ai, la nature n'aime pas gâcher et il suffit pour qu'une espèce soit viable qu'elle soit plus intelligente que sa principale source de nourriture. Alors, vous m'accorderez que par rapport aux graminées de la savane, nos amis gnous ont encore une petie marge...
Et puis, ce qui compte, c'est la survie de l'espèce, et comme le flamant nain, comme beaucoup de poissons marins, l'espèce gnou a choisi une stratégie de survie qui repose sur le nombre. Il n'y a pas, il n'y aura jamais assez de crocos, de lions, de léopards pour mettre en péril la survie de l'espèce : ils ne tuent pas plus de proies qu'ils n'en peuvent manger, contrairement à l'Homme (cf. le tristement célèbre Buffalo Bill et les bisons d'Amérique). Et encore, ils tuent préférentiellement les solitaires, les attardés, les malades, ceux qui courent le moins vite, ceux qui n'ont pas de chance (la chance, ça se provoque, Napoléon avant de promouvoir un officier au grade de général ne demandait-il pas si l'impétueux impétrant avait de la chance ?). Débarrassée des poids morts (sic), des lents, des fourbus, des malingres, des poissards, l'espèce n'en profitera que mieux. Adoncques l'espèce gnous n'est pas stupide si l'individu gnou l'est. Un peu...